Texte à méditer :   L'histoire est du vrai qui se déforme, la légende du faux qui s'incarne.   Jean Cocteau

J-C Romand, le faux médecin



Elève brillant Jean-Claude Romand, se lance dans des études de médecine en 1971 après une enfance lisse et sans histoire. Il tombe amoureux de Florence Cloret, pharmacienne dans une officine locale, une jeune femme qu'il connaît depuis l'enfance. Elle deviendra son épouse en 1980. Les jours passent. L'examen de deuxième année de médecine approche. Ce jour-là, Jean-Claude Romand entend son réveil, le regarde, mais ne se lève pas. Pourquoi ? Nul ne le sait véritablement, mais une chose est sûre, sa vie bascule ce jour-là.
Le jeune homme décide de faire croire à son entourage qu'il a validé sa deuxième année. Sept ans de suite, il se réinscrit, et occupe ses semaines à réviser. Sept ans de suite, il fait croire qu'il réussit brillamment ses études. En réalité, il ne passera plus un seul examen.


Le cursus terminé, le mensonge continue. Le jeune homme s'invente un poste prestigieux de chercheur à Genève, au sein de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Chaque matin, il se lève, prend sa voiture, s'arrête des heures sur des aires en bord de route ou dans des bibliothèques universitaires, et revient le soir raconter à sa famille une journée qui n'a jamais existé.
L'imposture durera de la sorte près de dix-huit ans. Comment fait-il pour s'en sortir financièrement ? Jean-Claude Romand a de l'imagination. Il fait croire à son entourage qu'il a des contacts bancaires en Suisse, qui lui offrent de beaux placements. L'homme se fait prêter de grosses sommes d'argent, dans le but de les faire fructifier en Suisse. En réalité, elles ne serviront qu'à financer son train de vie et à donner l'apparence d'une famille aisée.


Jusqu'au jour où le compte en banque s'assèche. Et de plus ses proches étaient sur le point de découvrir la vérité à son sujet : sa femme ne comprenait pas qu'elle ne pouvait pas l'appeler directement dans son bureau de l'OMS, un ami avait découvert que son nom ne figurait pas sur la liste des fonctionnaires de l'OMS, sa maîtresse Chantal, dentiste divorcée qui avait vendu son cabinet et qui lui avait confié ses 900 000 francs réclamait son argent.
Acculé, pris à son propre piège, c'est alors que Jean-Claude Romand bascule: il fracasse le crâne de son épouse pendant son sommeil, à coups de rouleau à pâtisserie. Quelques heures plus tard, il monte dans la chambre de ses enfants, Caroline 7 ans et Antoine 5 ans, et vide sur eux le chargeur d'un 22 long rifle. Il prend sa voiture, retrouve sa maîtresse Chantal Delalande à Paris. Il tente de l'assassiner en forêt de Fontainebleau mais n'y parvient pas. Il lui fait promettre de ne rien dire prétextant une maladie grave, et part vers le Jura, chez ses parents. La carabine est rechargée. Sa mère, son père et leur chien seront retrouvés morts. Rien ne semble devoir survivre à Jean-Claude Romand.
De retour chez lui, auprès des cadavres de sa femme et de ses enfants, il décide de mettre fin à l'engrenage de ses mensonges, qui l'ont conduit à ce massacre. Au petit matin, après avoir pris des barbituriques, il craque une allumette, et met le feu à sa maison. Mais le feu éclate à l'heure où passent les éboueurs. Les pompiers sont prévenus et réussissent à extraire Jean-Claude Romand vivant de l'incendie. Les pompiers retrouveront aussi les corps de la mère et des enfants à l'étage dans leurs chambres respectives, imbibés d'essence.
Plongé dans un coma profond, Jean-Claude Romand est conduit dans un hôpital de Genève. Les gendarmes découvriront dans sa BMW de location un message manuscrit : « Un banal accident et une injustice peuvent provoquer la folie. Pardon ».


Le 2 juillet 1996, Jean-Claude Romand est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité, avec une période de sûreté de 22 ans. Quelques mois après cette décision de justice, Jean-Claude Romand est transféré à la Maison centrale de Saint-Maur (France), où il est toujours détenu aujourd'hui.
Dès son arrivée, se souvient un ancien surveillant qui l'a côtoyé durant de longues années, il a suivi une formation informatique et obtenu le Passeport de compétences informatiques européen. Il était très brillant et semblait déjà en savoir plus que son formateur, sourit notre interlocuteur. Quelques mois plus tard, il intégrait l'atelier son, créé par Nicolas Frize et dont l'une des composantes est de restaurer les archives sonores. Avec une quinzaine d'autres détenus, il y travaille toujours.Au-delà des faits horribles qu'il a commis, c'est véritablement quelqu'un d'intelligent et qui n'a jamais fait la moindre vague. Il est couleur muraille avec un comportement qui le fait passer pour Monsieur tout le monde. Jamais une parole plus haute que l'autre et jamais la moindre allusion à son terrible passé. En revanche, il parle volontiers de son travail, mais rarement d'autres choses. C'est le genre de détenus auxquels on pourrait presque confier les clefs et partir en week-end, ponctue, sous forme de boutade, notre interlocuteur.

  

Petit complément : Plus de 20 ans ont passé. Sortira ? Sortira pas ?
A défaut de se voir confier les clefs, Jean-Claude Romand peut donc, aujourd'hui, faire une demande de sortie conditionnelle.
Juge de l'application des peines, Stéphanie Lochon-Dallet suit parmi bien d'autres, le dossier de Jean-Claude Romand. Il a été condamné à perpétuité et sa période de sûreté vient effectivement d'expirer. Comme tout autre prisonnier dans ce cas, il peut formuler une demande de libération conditionnelle. Une requête dont l'issue est dépendante de nombreux facteurs « comme une garantie de réinsertion, un projet professionnel, un hébergement, les avis d'experts psychiatres, de l'administration pénitentiaire ». Le demandeur séjourne également pendant six semaines au Centre national d'évaluation, où tous ces paramètres sont analysés.
Puis, dans le cas d'une réponse favorable, le « libérable » passe par une période probatoire pouvant ainsi bénéficier d'une semi-liberté pendant deux ans ou en portant un bracelet électronique.

C'est ainsi que le 25 avril 2019, après 26 ans de détention, il obtient une liberté conditionnelle et est libérable sous surveillance, avec obligation du port du bracelet électronique durant deux ans. Il a également l'interdiction de s'exprimer sur ses crimes. Cette libération est aussi soumise pour une durée de dix ans à des mesures d'assistance et de contrôle, selon le communiqué de Marie-Christine Tarrare, procureur général de Bourges. Il devra à l'issue de la période probatoire s'établir  en un lieu autorisé par l'autorité judiciaire, s'abstenir d'entrer en relation avec les victimes et les parties civiles et aura interdiction de se rendre dans les régions Île-de-France, Bourgogne-Franche-Comté et Auvergne-Rhône-Alpes.

  

Que faut-il en penser... à vous de juger !


Date de création : 08.09.2019 » 10:21
Catégorie : Histoires Insolites - Escrocs. Arnaques. Canulars
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